La vie ? La mort ? Oh, juste un jeu d'enfant ! #KuroUnmei

Mais qui es-tu, que veux-tu donc, Kuro ? Tu es si mignonne quand tu veux, je le sais, mieux que personne. Tu étais ma meilleure amie, Kuro, et je t'ai toujours connue comme étant une fille douce et sensible, qui protégeait les plus faibles. Tu te souviens, le jour où Yamada s'est fait agressé dans les couloirs du collège par le trio de grosses brutes ? Tu t'es interposée, tu t'es faite frapper mais ça ne t'a pas empêchée de te relever pour leur cracher ton venin à la figure. Oui, tu étais comme ça, tu t'inquiétais pour les autres avant toi-même. Ô combien j'ai pu m'inquiéter en te voyant revenir, un grand sourire aux lèvres alors que tu avais un œil violacé et le nez qui saignait. Mais toi, tu t'en fichais, tu disais que c'était pour la bonne cause. Tu m'interdisais de t'en empêcher, alors, je veillais sur toi, dans l'ombre. Quand quelqu'un n'allait pas bien, tu étais la première à lui offrir ton épaule, même si la personne t'était inconnue. Je suis sûre que tu aurais même été capable de venir en aide à l'un de tes ennemis, tellement tu étais altruiste. Oui, tu étais l'amie parfaite, il m'est impossible d'en douter.

Mais regarde qui tu es devenue... ce que tu es devenue. Tu te joues des autres comme s'ils n'étaient que des poupées, tu les casses comme une brindille sèche, tu les brises comme un vase en porcelaine. Tu leur fais croire monts et merveilles, puis tu les regardes tomber de haut, l'air hautain, une lueur de victoire luisant dans ton regard. Tu te joues de leur cœur pour les mettre à tes pieds, et si la méthode douce ne fonctionne pas tu fais couler leur sang pour les faire plier. Pour toi, ils ne sont plus personne. Il t'est devenu impensable d'aider quiconque, tu te contentes d'observer en ricanant, voire même tu te joins volontiers aux persécuteurs. Tu as l'air d'y prendre plaisir, et je ne te reconnais plus. Kuro, où es-tu passée ?

Non, je suis sûre que tu ne peux pas être devenue ce que je vois. Impossible. Je suis certaine que la Kuro que j'ai connue est là, quelque part, blessée, enchaînée dans un coin de ton cœur, en attente de quelqu'un qui pourrait la libérer. J'aimerais tant pouvoir t'aider, pouvoir faire voler en éclats les maillons de ces chaînes qui te retiennent. Mais, je ne le peux plus, Kuro, je ne peux plus rien faire depuis que la vie m'a été ôtée... par tes propres mains.

Mais tu sais, je ne t'en veux pas. Je sais que ce n'était pas toi. Tu as toujours été ma meilleure amie, Kuro, et même si tu m'as tuée, mes sentiments ne changeront jamais à ton égard. Tu sais, je t'ai aimée, et je t'aime encore, peut-être bien plus que je ne le devrais. Et quand je te voyais avec ces garçons, à les câliner, à les embrasser, j'avais mal, j'étais jalouse. Un soir, j'ai faillit te l'avouer, je n'ai pas osé. Tu étais une fille si fragile, Kuro, je ne voulais pas te blesser, je ne voulais pas t'effrayer, alors, je me suis tue. Et je t'ai vu aimer, pleurer, sourire, changer, tuer.

Aujourd'hui, cela aurait fait 13 ans que nous nous connaissions. J'aurais aimé être là pour te faire sourire, pour de vrai. Mais c'est impossible. Alors, je me contenterais de te regarder encore, sourire pour de faux, jouer, blesser, et tuer...

Le premier mot qui nous vient, pour parler de toi, c'est "kawai". Parce que tu l'es, avec ta bouille enfantine, cet air presque bébé que tu as gardé, avec ce joli teint de porcelaine. Tu sembles si fragile, on aurait presque peur de te briser en te serrant un peu trop fort dans nos bras. Tes grands yeux sont emplis d'innocence, la plupart du temps, et tu fais bien plus jeune que ton âge. Surtout que tu n'es pas bien grande, avec ton minuscule mètre cinquante-cinq. Mais, tu l'as toujours dit, et prouvé, ta petite taille te permet de te faufiler n'importe où, c'est ce qui faisait que tu étais imbattable à cache-cache, on ne te trouvait jamais. A moins de remarquer ta tignasse bleue. Avant, tu étais blonde, mais tu as depuis toute petite eu un goût pour les colorations, tu es passée par tout : le noir, le rouge, le rose, pour enfin trouver la couleur idéale, le bleu. Un bleu ciel magnifique, qui t'affiche aux yeux des autres, mais ça ne te dérange pas, d'être le centre d'attention. Laide, belle, mignonne ? Qu'importe pour toi, chacun pense ce qu'il veut, tu n'as jamais cherché à plaire aux autres, mais uniquement à toi-même.

Tu peux t'habiller de mille et une façon différentes, surtout que tu as un goût prononcé pour les cosplays de princesse ou de personnages de jeux vidéos, ça ne surprenait plus personne de te voir te balader déguisée en Blanche-Neige ou en Zelda, tu défilais devant nous en jouant ta mini-top model, et on applaudissait en cœur. Et puis, quand quelqu'un avait assez de courage pour tenter de t'habiller normalement, tu enfilais aussitôt un ensemble qui rappelait un uniforme scolaire, habitude que tu as toujours gardée. Du coup, on peut désormais te voir, en chemise un peu trop ouverte, jupe un peu trop courte, sans tout à fait t'en rendre compte... à moins que ce ne soit volontaire ?

Tu aimes bien jouer de tes charmes et te mettre en avant, maintenant que tu as de jolies formes, notamment une belle poitrine bien ferme, des fesses galbées tout juste ce qu'il faut. Tu as tout d'une femme, mis à part peut-être la taille, mais tu mises tout sur tes atouts pour faire tomber les autres dans tes filets.

Charmeuse et mignonne, sensuelle et pourtant fragile, tu n'as rien d'une fille sportive, au contraire, tu es aussi légère que les poids que tu peux porter. Les travaux qui nécessitent une certaine force, tu les laisses à d'autres, mais s'il s'agit de rapidité et d'agilité, on peut compter sur toi ! Tu es fine et souple, et s'il y a besoin de quelqu'un pour attraper un truc en hauteur, on te met sur une épaule et en un temps record, l'affaire est faite !

Mais attention, un carré de chocolat en trop et c'est la misère ! Enfin, c'est ce que tu crois, comme toutes les filles de ce monde, tu prêtes une attention maniaque aux chiffres sur la balance, sans pour autant tomber dans des extrêmes, tu sais te contrôler, et tu préfères abandonner le chocolat pour quelques semaines et manger plus équilibrer, plutôt qu'avaler tout ce qui te tombe sous la main pour finalement t'en rendre malade. Du coup, de temps à autre, tu peux avoir ce petit ventre qu'ont beaucoup de demoiselles, et qui en fait désespérer bon nombre.

Alors, au final femme sensuelle ou enfant kawai, la nuance s'en voit infiniment subtile...

Kuro.

C'est ainsi qu'on te nomma, toi, si minuscule dans les bras de ta mère. La douce Kurenai, qui rêvait d'un enfant depuis toujours, voyait son rêve réalité. Tu étais son rêve, toi, petite fille aux cheveux blonds et aux yeux bleus. Tu avais mis quelques interminables minutes avant de pleurer pour la première fois; durant ces quelques instants, ta mère avait pleuré, elle était certaine d'avoir fait quelque chose qu'il ne fallait pas pendant sa grossesse. Et puis, tu as crié, et elle a été la femme la plus heureuse du monde. Elle te tenait contre elle, toi, petit bébé en pleine santé.

Tu as mit longtemps avant de faire tes nuits, tu épuisais tes parents. Il faut dire, tu savais donner de la voix pour te faire entendre. Peu à peu sont venus le temps des premiers rires, des premiers mots, des premiers pas. Tu grandissais à une vitesse phénoménale, et, à l'école, tu étais l'une des plus minutieuses et appliquées. Tu voulais que ton papa et ta maman soient fiers de toi, et ils l'étaient. Tu grandissais, heureuse, comme chaque enfant devrait l'être, gâtée sans en être pourrie, tu disais que tu avais les parents rêvés, et tu n'en doutais pas. Qui aurait pu prédire à tes 14 ans, ce bonheur allait prendre fin ?

Personne.

Un soir, ta mère n'est pas rentrée. Ton père, inquiet, a appelé la gendarmerie. Des heures durant, tu pleurais et ton père s'énervait, envers et contre tout. Et puis, à l'aube, elle avait été retrouvée. Vivante. Mais violée. De là, ton père commença à changer, à devenir violent. Il sombra dans l'alcool, il sortait, revenait de plus en plus tard, tandis que tu le voyais de moins en moins. Tout ne fit qu'empirer lorsqu'ils apprirent que ta mère était tombée enceinte de ce viol, et qu'il était trop tard pour avorter. Ton père se mit à frapper sa femme, et tu devais t'interposer à chaque fois. Tu détestais le "monstre" qui grandissait dans le ventre de ta mère, tu te disais que tout était de sa faute. Et tu ne souhaitais plus qu'une seule et unique chose : te débarrasser de cette cadette. Ta haine se ressentait dans ton comportement, tu avais changé, du tout au tout. Toi qui protégeais dans les autres autrefois, tu les détruisais à présent. Tu n'avais plus ni conscience ni moral. Tu ne souhaitais que la souffrance d'autrui.

Puis, le jour de la naissance arriva, et rien ne se passa comme prévu. Ta mère, affaiblie par les coups qu'elle recevait de son mari, ne survécu pas à l'accouchement. Ton père hurla, toi aussi. Tu criais que c'était injuste que le bébé ai survécu, lui. Tu griffais, mordais, pleurais, réclamais justice. Et puis, d'un coup, tout fut noir.

Tu te réveillais dans un lit d'hôpital, dans la même chambre que ta petite sœur que tu haïssais déjà tellement. Ton père n'était pas là, tu étais seule avec cette chose qui avait volé la vie de ta mère. Alors, tel un automate, tu étais sortie de ton lit, et tu t'étais approchée de celui de cette minuscule créature qui dormait paisiblement. Un sourire fou aux lèvres, tu avais précautionneusement glissé tes mains autour de son cou, et tu avais serré, doucement, lentement, en murmurant une complainte effroyable, pour finalement t'enfuir de cet hôpital et rentrer chez toi, ne laissant derrière toi que le corps d'un être qui n'aurait jamais le temps d'apprendre à vivre, désormais.

Assise sur ton lit, chez toi, tu attendais patiemment que ton père rentre. Ce qui ne tarda pas. Tu affichais un grand sourire, tu pensais qu'il allait venir te prendre dans ses bras et te remercier d'avoir vengé la mort de sa femme. Mais non, ce jour là, lorsqu'il entra dans ta chambre, ce fut pour te faire plier sous ses coups, tu pleurais, criais ta douleur, mais il semblait comme sourd et aveugle. Ce ne fut qu'après longtemps, tard dans la nuit, qu'il s'en alla, te laissant, à geindre sur le parquet taché de ton sang et de tes larmes. Et ce ne fut que la première fois d'une longue série qui durerait deux ans.

Te souviens-tu de ce jour là, Kuro ?

Tu fêtais tes 16 ans, avec Ritsu, ta meilleure amie. Vous étiez chez elle, avec son petit frère, âge d'un an. Ses parents étaient de sortie. Au début, tout se passait bien, vous riiez, vous bavardiez, tout allait pour le mieux. Mais, lorsque le petit garçon se mit à pleurer, il y eu comme un déclic en toi. Et, pendant que la sœur du petit était dans la cuisine pour préparer le biberon, tu t'étais approchée du maxi-cosi du bébé. Tu avais encerclé son petit cou avec tes petites mains, et tu avais serré, serré, serré... Et puis, derrière toi, il y avait eu un hoquet d'effroi. K... Kuro ? Lentement, tu avais tourné la tête vers ta meilleure amie, en relâchant le cou du bambin inerte. Un grand sourire fendait ton visage alors que tu t'approchais d'elle. Oui, Ritsu ? Ca ne va pas ? Ritsu avait hurlé, s'était jetée sur son frère puis sur toi, pour te secouer; tu t'étais laissée faire, tel un pantin. Et puis, d'un coup, les plaies que t'avait infligées ton père s'étaient rouvertes, ton sang avait coulé, formant des fouets écarlates. Sans plus en avoir conscience, tu frappais celle que tu disais être ta meilleure amie, elle te suppliait d'arrêter, avec de moins en moins de force. Mais ton, tu continuais, déchiquetant peau et chair sans t'arrêter. Le cadavre était méconnaissable.

Ses parents arrivèrent à cet instant là, et tu te stoppais net, te tournant vers eux, en souriant. Les mains jointes dans ton dos, un air innocent au visage, tu leurs souhaitas la bienvenue. Leurs yeux s'écarquillèrent d'horreur face à la scène macabre qui s'offrait à eux : le sol et les murs de leur salon couverts d’éclaboussures poisseuses, leur fils pâle et immobile dans son maxi-cosi, un corps mis en pièces au sol, et, face à eux, toi; toi, couverte de sang de la tête aux pieds.

La suite est floue à tes yeux, mais bientôt tu fut menottée et enfermée. Le jour de ton jugement arriva, et, ce fut sans surprise que la sentence tomba : ta condamnation. Tu serais envoyée à la seule prison privée du Japon : Deadman Wonderland, lieu dont tu avais déjà visité le parc d'attraction lors qu'un voyage scolaire. Alors, pour la première fois depuis la mort de ta mère, on entendit résonner ton rire.